[Autres mondes] Les activistes de l'imaginaire

Ayant toujours été portée sur l'épouvante et le fantastique, c'est tout naturellement que je me suis liée aux littératures de l'imaginaire dès l'enfance. Cependant, j'ai fait des études de Lettres et en partie grâce à cela, je ne me suis jamais renfermée sur ce domaine. J'aime la littérature, j'aime les mots. Et voilà qu'en tant qu'auteur, je me heurte à ce mur énorme qui sépare l'Est et l'Ouest de la littérature, celui qui sépare la "blanche" de la "SFF". Je trouve dommage que ce mur soit si sûr de lui-même, bien ancré dans les habitudes des uns et des autres, chacun de son côté du mur.
Mais au-delà, de ce constat, force m'est d'en formuler un deuxième. De façon peut-être inattendue par rapport aux clichés qui prétendent qu'il y a une "vraie" littérature, sérieuse et la seule qui puisse réellement revendiquer sa qualité "littéraire" et exciter l'intérêt des universitaires, du côté de la SFF, le monde associatif ou de l'édition indépendante est d'une part bien plus actif, et d'autre part beaucoup plus professionnel. Par exemple, si vous cherchez à publier une nouvelle dite de "littérature blanche" (et je déteste ce terme), vous tomberez sur tout un tas de sites dont l'amateurisme vous fera reculer tout de suite. Peut-être que cet amateurisme n'est qu'une façade. Mais dans le monde des arts, la communication c'est primordial. Et moi, quand je tombe sur un site web fabriqué comme n'importe quel site perso amateur (couleurs criardes, mise en page chaotique, animations flash toutes moches, vous voyez le tableau), ça me fait fuir immédiatement. Et c'est sans parler de ces revues qui vous proposent des concours de nouvelles quasiment sans communication, si ce n'est l'accès au règlement. Ce sont des structures floues, on ne sait pas à qui on s'adresse, on ne comprend pas le projet qu'il y a derrière. Pareil pour les ateliers d'écriture. les structures qui en proposent sont toutes payantes, et on ne sait jamais trop si on va se retrouver avec un groupe de grand-mères qui cherchent à s'occuper, ou bien avec de véritables passionnés d'écriture. En fait, le monde en ligne de la littérature blanche (excepté pour les éditeurs professionnels, et encore, beaucoup ne semblent avoir aucune personnalité, aucune véritable ligne éditoriale, ou alors puent un certain intellectualisme à deux francs six sous) est confondu avec celui de l'écriture pour les amateurs. Je ne dis pas que ce n'est pas bien, mais quand on a d'autres ambitions, on a l'impression qu'il s'agit d'un monde refermé sur lui-même, qui gravite autour des auteurs consacrés par la presse et les chroniques de la rentrée littéraire. Je me demande toujours comment ces auteurs en sont arrivés là, quand il y a si peu de tremplins véritablement destinés aux jeunes écrivains, et non à n'importe qui qui a envie de s'essayer à l'écriture, comme je pourrais m'initier à l'aquarelle, parce que c'est plaisant, et non parce que je veux devenir une peintre reconnue.
Voilà, je n'écris pas ce poste pour cracher sur la littérature blanche, mais surtout pour dénoncer d'une part la fracture qui existe en France entre deux littératures, et d'autre part pour rendre hommage au professionnalisme et à l'esprit d'initiative, à l'énergie qui anime le milieu de l'imaginaire. Ces deux mondes ne sont-ils pas réconciliables ? Pourquoi devoir choisir son camp ? Certes, pour ma part ma sensibilité est plutôt fantastique. Mais en écritures, j'aime essayer des trucs. Les appels à textes sont pour moi un moyen régulier de les essayer. Mais si mon esprit vient à dériver vers des contrées prohibées, je suis retenue par ce mot écrit en rouge vif : imaginaire. Donc, pas de possibilité d'écrire des textes réalistes qui pourraient bénéficier de la même attention et du même professionnalisme. C'est un constat décevant. Je suis sûre que plein de gens voudraient me contredire, et croyez-moi, j'attends la contradiction avec impatience.

PS: si j'ai pensé à cela ce n'est pas par hasard, vous trouverez un texte non fantastique dans la rubrique "textes". Et oui, j'ai cherché si ça pourrait intéresser un éditeur ou un magasine, mais je n'ai rien trouvé qui me séduise. Alors tant pis, je le poste ici, car il y sera toujours mieux que dans mon dossiers "nouvelles achevées", sur mon ordinateur, puisque ici il a une chance d'être lu. Ce n'est pas pour la reconnaissance, mais simplement parce que j'ai dépassé depuis longtemps l'idée d'écrire "pour moi". Non, mes textes ont vocation à être lus, peu importe par qui et par combien. C'est dit :)

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